Reportage: La lavande, l’or bleu de Provence 

Quelle splendeur violette! Les images de champs infinis, alignés et exempts de mauvaises herbes, sont gravées dans nos mémoires depuis longtemps grâce à Instagram ou aux calendriers. Pourtant, il ne s’agit pas de lavande vraie, mais bien de lavandin. La lavande vraie, privilégiée pour l’aromathérapie, porte une couleur pourpre délicate et pousse dans les régions arides et plus élevées de Provence, où elle développe son huile essentielle aux multiples vertus.  

«Aujourd’hui, plus de 80 % des cultures de lavande en Provence sont composées de lavandin»

Othmar Wüest, Rédacteur et auteur, écrit et mène des recherches pour Aromalife

Quelle splendeur violette! Les images de champs infinis, alignés et exempts de mauvaises herbes, sont gravées dans nos mémoires depuis longtemps grâce à Instagram ou aux calendriers. Pourtant, il ne s’agit pas de lavande vraie, mais bien de lavandin. La lavande vraie, privilégiée pour l’aromathérapie, porte une couleur pourpre délicate et pousse dans les régions arides et plus élevées de Provence, où elle développe son huile essentielle aux multiples vertus.  

«L’ambassadrice du calme»  – sur les traces de la lavande

Le paysage change tout à coup. Dans la ville chaude et humide de Carpentras, les plantations de melons et de cerises dominent. Je conduis à travers la forêt provençale en direction du plateau de Sault. Le Mont Ventoux, tout en longueur et blanc comme de la chaux, nous salue au loin.  À 800 mètres au-dessus de la mer, le vent est frais et la respiration plus facile. Chênes, cèdres et buis bordent la route et de petits champs apparaissent entre eux, et soudainement – la couleur violette se manifeste.

Depuis l’Esplanade, petit parc de Sault, je découvre le Plateau baigné dans la lumière du soir. Une mosaïque de lavande, d’engrain et de sauge muscat, de haies et encore de haies – avec au beau milieu quelques moutons.  

Dans les champs de lavande

Abeilles, bourdons et papillons logent dans ces champs de couleur mauve – un bourdonnement divers et incessant. Attirées par la forte teneur en sucre des fleurs, les abeilles produisent le fameux miel blanc de lavande.

Une brise légère et rafraîchissante souffle quasiment en permanence. Lorsqu’elle se transforme en mistral, ses vents descendants assèchent les champs, ce qui profite à la lavande. Le danger de feu de forêt augmente cependant aussi. Les champs resplendissent dans des nuances mauves finement dégradées, en alternance avec le Petit Épeautre dont la couleur vert jaune crée le contraste à merveille. Ici, des lentilles et des pois chiches sont également cultivés. 

En visite chez Vincent – le lavandiculteur   

Je rends visite à Vincent dans sa ferme, la Loubatière. Depuis des générations, la lavande est cultivée ici, à 100 mètres au-dessus du Plateau qui domine Sault. 

Je tressaille brièvement car son fusil, ouvert et prêt à être chargé, est posé sur la table de la cuisine. Cet indice prouve que j’ai non seulement affaire à un lavandiculteur passionné, mais également à un chasseur chevronné. Aussitôt, le débat sur le loup s'enflamme, comme en Suisse. J’ai du mal à saisir son français provençal, alors je dirige gentiment la discussion vers la lavande. 

Vincent vit ici avec sa famille, ses quatre chiens de chasse, deux ânes, des oies et des poules sur une surface de 130 hectares. Il exploite 80 hectares principalement pour la culture de la lavande vraie (Lavandula angustifolia), de petites quantités de lavandin (Lavandula x intermedia) et de lavande aspic (Lavandula latifolia).

À bord de son pick-up, Vincent me fait découvrir des champs passablement dispersés. Je dois m’accrocher lorsqu’il aborde des virages serrés ou des fortes pentes sur un sol meuble. Ces espaces de culture se trouvent en partie entre de petits massifs forestiers remplis de buis et de buissons épineux, défrichés avec difficulté par ses ancêtres. Riche en calcaire et aride, le sol graveleux offre un terrain idéal pour la lavande. Les étés chauds et secs entrecoupés par des hivers glacials lui conviennent parfaitement. Peu exigeante, cette plante ne demande qu’une chose: du soleil, du soleil et encore du soleil.

L’art de la culture

La lavande n’est pas encore entièrement en fleur en cette mi-juillet, car le printemps a été humide. Mais, au moment propice, il faudra la récolter dans les dix jours. L’inflorescence constitue le facteur décisif. En fonction de l’espèce de lavande, du climat et de l’altitude, ce stade peut être atteint déjà à fin juin. 

C’est en parlant de culture que Vincent s’anime réellement. Il travaille avec différentes techniques, dépose les semences directement en rangées ou prélève des plants dans un champ prévu à cet effet, et les replante un à un dans les longues rangées, toujours en respectant un espace de 1,80 mètre. Cette mesure imprègne les paysages et est due à l’empattement des tracteurs.

L’entretien des plants ainsi que des semences demande beaucoup de temps et de travail manuel. Dans la culture biologique, les rangées sont régulièrement désherbées, alors que dans la culture conventionnelle, les herbicides se chargent de cette tâche. Il faut compter trois ans entre la semence et la première récolte de lavande vraie, après quoi la lavande est capable de repousser les mauvaises herbes par ses propres moyens. Bien entretenue, une plantation peut être exploitée durant une quinzaine d’années.

Toutefois, une bonne croissance n’est jamais garantie. Les plantes de Vincent ressentent également le stress climatique. Des parasites comme la cécidomyie ou la chrysomèle menacent les cultures. Toutes les espèces de cicadelles qui s'attaquent aux racines sont particulièrement redoutables. Comme leurs larves vivent dans le sol, même les insecticides sont inefficaces. Mais la couleur vert clair des plantes attaquées trahit rapidement les parasites. Vincent a entre-temps adapté son mode de culture en semant directement la lavande dans les rangées qui se sont en partie détachées. Avec succès, comme il le constate avec satisfaction.

L’art de la distillation

Vincent travaille en mode biologique et respecte les règles de l’Appellation d’origine protégée AOP. Il utilise un distillateur pour huiles essentielles qu’il manie avec expérience et sensibilité. Aux alentours de la région de Sault, il existe neuf distilleries. La distillerie LES LAVANDES DE VENTOUX offre à Vincent un partenaire expérimenté et de confiance en la personne de Jérôme. Une longue amitié les lie et Jérôme Boenle cultive également la lavande. 

J’arrive la veille, juste à temps pour la distillation. Les agriculteurs ont livré leur récolte dans de grands caissons. Ces derniers sont hermétiquement fermés, puis placés sous vapeur d’eau. La vapeur enrichie d’huiles essentielles s’élève dans des tubes qui débouchent en spirale dans un refroidisseur. Là, la vapeur se condense et le mélange obtenu se sépare en eau et en huile essentielle. L’huile, plus légère, peut être directement recueillie. L’eau aromatique restante est vendue sous forme d’hydrolat.  Au total, la distillation d’un caisson dure environ une heure et demie.

Jérôme sourit lorsque je le questionne sur les contrôles de qualité. Il a été président de l’Association AOP et connaît donc toutes les exigences et tous les contrôles en vigueur. Même si la plupart de ses phrases commencent toujours par: «c’est compliqué, mais ...», je perçois la joie et la fierté du lavandiculteur. 

De la ferme à la boutique

Dans la jolie boutique de la rue de l’Église, je rencontre

Emmanuelle, l’épouse de Vincent. Elle vend des bouquets de lavande frais, des huiles essentielles et des savons, des baumes et des crèmes. Tous ces produits sont fabriqués grâce à la lavande de la ferme. On ne peut faire plus simple.   

En ce moment, elle développe sa propre boutique de vente et regorge de nouvelles idées. Il y a quelques années, elle faisait partie des «nez», c’est-à-dire des personnes qui évaluent les meilleures huiles AOP en se servant de leur odorat.

Autrefois, Vincent et Emmanuelle étaient des marchands passionnés. Jusqu’à neuf fois par semaine, ils proposaient leur marchandise. Aujourd’hui, ils participent encore aux fêtes de lavande les plus réputées, comme à Ferrassières et à Sault. Le marché de Sault a notamment lieu le 15 août et Ferrassières se déroule le premier dimanche de juillet.

La principale partie de leur récolte s’écoule chez les partenaires de distribution. Vincent travaille avec  AROMA’PLANTES et TERRA PROVENCE, deux entreprises qui examinent l’huile essentielle avec une grande rigueur. 

Contrôle de qualité chez TERRA PROVENCE  

Une route de col isolée serpente en direction du département de la Drôme. Typiquement, il y a plus de vélos de course que de voitures. Alors que je pédale sur le col, j’aperçois à nouveau des champs de lavande qui s’étendent jusqu’à l’horizon. En arrivant à Montguers, Victoire m’attend à l’extérieur. Elle est ingénieure agronome et dirige TERRA PROVENCE. Ici, la qualité des huiles essentielles est analysée par chromatographie. Le panachage avec des huiles de mauvaise qualité doit être entièrement exclu. Victoire et son équipe s’autorisent en outre des contrôles ponctuels dans les champs, car l’origine de la lavande est essentielle.

TERRA PROVENCE ne traite que des produits provenant de cultures biologiques. Le passage d’une culture traditionnelle à une culture biologique nécessite trois ans de repos pour les champs de lavande. Tous les herbicides sont strictement interdits. Sans chimie, le travail manuel est apprécié. Entre-temps, de nombreux agriculteurs du plateau privilégient le mode biologique.  

Victoire connaît les effets aromathérapeutiques de ses plantes. Elle est convaincue des effets positifs de la nature et des vertus bénéfiques de la lavande sur le psychisme. À ses yeux, la lavande est une huile qui aide à se recentrer, elle équilibre et apaise.  Une huile qui fait du bien.

Ici aussi, les huiles de Vincent sont examinées avec soin. Il travaille avec TERRA PROVENCE depuis longtemps. La qualité, la transparence et les prix stables sont la base de leur confiance mutuelle. Le reste, c’est de la passion.

Appellation d’origine protégée AOP  

Les huiles essentielles de Vincent portent le label AOP (Appellation d’origine protégée), tout comme les vins et les huiles d’olives. Origine et qualité sont surveillées par «l’Institut National des Appellations d’origine». C’est ici que les fameux «nez» entrent en jeu. Pour obtenir le label, les huiles sont sujettes à un test olfactif réalisé par sept expertes et experts régionaux.

La première étape consiste à examiner les proportions indiquées en camphre, linalol et 12 autres substances. L’origine géographique a également son importance. Le label est uniquement valable dans les 255 villages des Départements de la Drôme, Vaucluse, Hautes-Alpes et Alpes de Haute-Provence (régions situées au-dessus de 800 mètres d’altitude). Les plantes et les semences doivent rester dans le circuit de la ferme. Un détail: souvent, les agriculteurs eux-mêmes restent sur place pendant la distillation afin de s’assurer qu’il n’y a pas de mélange avec des huiles étrangères.

Lavande vraie (fine) une source de repos multiple Lavandula angustifolia

Note olfactive: florale, chaude

Culture: entre 600 et 1 400 mètres d’altitude

Origine: env. 10 % de la Provence

Première récolte: après trois ans

Épis, tiges, couleur: multiple, allant de la couleur mauve au blanc

Récolte: 25 kilogrammes d’huile essentielle par hectare

Diversité de l’odeur: élevée

Autres espèces connues: lavande aspic et lavande papillon

Domaines d’utilisation de la lavande vraie (fine) 

Avec ses nuances florales et chaudes, la lavande vraie est considérée comme la plus petite des pharmacies familiales. Grâce à sa teneur élevée en linalol et en acétate de linalyle, elle favorise le calme intérieur, la détente et un bon sommeil. Elle a donc son importance en aromathérapie. La lavande fine apporte un apaisement en cas de piqûres d’insectes et soigne la peau (des enfants) en douceur. En cuisine, elle est un véritable secret pour parfaire différents plats.

Lavandin – un hybride fascinant Lavandula hybrida

Note olfactive: fraîche, herbacée, intense

Culture: entre 0 et 900 mètres d’altitude comme bouture

Origine: env. 80 % de la Provence

Première récolte: dès la première année

Épis, tiges, couleur: tous identiques, de couleur violette

Récolte: de 90 à 120 kilogrammes d’huile essentielle par hectare

Diversité de l’odeur: faible

Autres espèces: lavandin Super, lavandin Grosso, lavandin Bleu

Domaines d’utilisation du lavandin

Grâce à sa teneur en camphre, la fragrance claire, âpre et intense du lavandin exerce un effet stimulant, soutient la circulation et revitalise les muscles et les articulations fatigués. Le lavandin peut apaiser les irritations cutanées et est souvent utilisé dans les savons et les huiles de massage. Comme le camphre qu’il contient éloigne les insectes, les petits sachets à placer dans les armoires ne contiennent généralement que du lavandin. 

Auteur

Othmar Wüest

Rédacteur et auteur, écrit et mène des recherches pour Aromalife

contact

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Tags sur l’article:

Communication d'entreprise